Château-Thierry. Non, la piscine n'est pas sauvée : le maire accorde sa démolition !

Castels, vous rêviez de salle de sport, de culture ou de commerce de qualité ? Vous aurez du fastfood !

 

Nous venons d'apprendre avec consternation que la vente des trois bâtiments

de la piscine sera signée le 19 décembre 2019, au bénéfice d'un promoteur immatriculé au Luxembourg.

 

En conséquence, les occupants actuels, la Pâtisavonnerie de Madame Marchand et l'association Omois Canoë Kayak, seront expulsés en janvier 2020. À cet emplacement recherché, les vastes locaux, bientôt démolis, auraient pu continuer d'accueillir plusieurs commerces ou associations.

 

Le maire de ChâteauThierry Sébastien Eugène a clôt le débat il y a plusieurs mois, sans dévier de sa route. Pour lui, la piscine

est sauvée et il ne veut plus en entendre parler.

 

Nous avons gêné les petites affaires du maire et du promoteur pendant quelques mois. Maintenant, le simulacre de débat

est terminé : nous seront bientôt devant le fait accompli. L'ancienne piscine ne sera pas sauvée. Le projet imposé se présente

sous eux formes :

 

– L'originale : la démolition totale (toujours d'actualité en l'absence de retrait du permis) ;

– La variante : la démolition à 80 % (bâtiment des bassins à l'exception de sa charpente, accueil, galerie et loge du gardien seraient rasés). Cette variante devrait faire l'objet d'une nouvelle demande de permis de construire.

 

Lors de 5 réunions de « conciliation », les associations SPPEF et Domisiladoré n'ont pas été entendues. Il leur a été demandé d'entériner l'un ou l'autre projet, aux motifs que les habitants veulent de nouveaux loisirs à ChâteauThierry (c'estàdire deux vendeurs supplémentaires de burger industriel), qu'un compromis de vente a été signé en novembre 2018 et que le budget communal doit s'équilibrer.

 

La mairie se débarrasse d'un bijou de famille en le réduisant à la valeur de son seul terrain qui aiguise les appétits, c'estàdire

pour 700 000 €.

 

L'arrivée des restaurants Au Bureau et d'Independance Burger, présentés sans sourciller comme un « pôle de loisirs » par le maire,

n'est qu'un aménagement à courte vue. Cette absence de vision pour la cité, aujourd'hui à bout de souffle bien qu'encore trop fréquente, dénoncée depuis longtemps par les urbanistes, l'a été récemment même au sommet de l'État. Elle témoigne d'une approche sclérosée dictée par des décideurs cupides réfractaires aux enjeux urbains et climatiques actuels.

 

Du même acabit, la crèche est un leurre, une ruse légale permettant d'écarter d'autres investisseurs, y compris ceux qui voulaient acheter plus cher. Son implantation incongrue au milieu de trois vendeurs de burgers autorise l'aliénation d'un bien public sans appel d'offre ou mise en concurrence. Il est soigneusement tu que la crèche ne verra pas le jour car elle a reçu un avis défavorable

de la Protection maternelle et infantile de l'Aisne en juin dernier.

 

Les associations SPPEF et Domisiladoré devraientelles cautionner ces façons ?

 

Opaque et antidémocratique, le fait du prince ignore les réponses de 940 personnes au sondage paru dans le magazine municipal

à CT n° 14 en mars 2016 :

 

– 66 % des sondés plébiscitèrent la reconversion de la piscine ;

– 33 % optèrent pour des commerces ou un ensemble immobilier de qualité, en cas de vente du site. 

Signalons que la démolition ne fut pas mentionnée dans ce sondage. En fait d'immobilier de qualité, sont aujourd'hui prévus des bâtiments génériques que l’on pourrait qualifier de « boîtes à chaussures », sans respect pour ce site stratégique d’entrée de ville

et en bord de Marne, dans une zone « d’habitat individuel majoritaire » selon le plan local d'urbanisme.

 

S'affiche ainsi le mépris de la volonté de nombreux habitants du sud de l’Aisne, à l'avantage d'intérêts privés. Pourquoi avoir consulté les citoyens sur l'avenir de la piscine pour ensuite s'asseoir sur leur avis ? L'entêtement de la mairie a eu raison de la démocratie

à ChâteauThierry.

 

Pourtant, la piscine municipale appartient à tous. Construite pour durer sur un terrain exproprié à bas prix pour l'intérêt général, longtemps payée par les contribuables, aujourd'hui amortie, est un bien commun.

Les élus, simples représentants des citoyens, n'en sont que les gardiens au profit des générations futures.

 

Face à la communication écrasante et à la censure de la mairie, le débat public est escamoté ou, lorsqu'il a lieu, déséquilibré. Volontairement et depuis le début, les citoyens sont laissés dans l'ignorance tandis que de vagues rumeurs circulent. Pourtant,

ceux qui entendent nos explications comprennent vite les enjeux de la situation.

 

La mairie inflige aux Castels le projet vénal et hideux de son promoteur en écartant toute alternative ; elle snobe les autres porteurs

de projets, ignore nos courriels et nos propositions. En voici quelquesunes :

 

– Transformer la piscine en locaux associatifs, d'entreprises ou commerciaux pour conforter le lien social, la solidarité, développer l'économie, le tourisme, les produits locaux et le rayonnement de la ville. Ceci est possible avec de l’investissement privé,

du financement public (les fonds LEADER, disponibles pour 80 % de l'enveloppe, sont sousutilisés), voire même un budget municipal participatif.

– Transformer la piscine en salle de sport, conformément au résultat du sondage de 2016.

– Rouvrir la piscine à l'usage des petits et des anciens ; ce sujet n'étant tabou que chez certains. Premièrement, pour réduire

les noyades, la ministre des Sports Roxana Maracineanu promeut le développement de l'apprentissage de la natation grâce

à son plan « aisance aquatique ». Deuxièmement, le conseil régional des HautsdeFrance accompagne financièrement les mairies et

les intercommunalités dans leur projet de construction ou de rénovation de piscine. En effet, dans ce domaine, les HautsdeFrance

ont un mauvais score et ChâteauThierry fait chuter la moyenne ; le Citélium ne répond pas à tous les besoins.

 

D'autres projets ambitieux ont été soumis par des investisseurs privés ; ce fut encore le cas récemment par deux figures locales,

en vain.

 

Concomitamment à la démolition de la piscine et sans complexe, la cité veut s'afficher comme « Terre de Jeux 2024 ».

Que d'affichage avant les élections !

 

Pourtant, notre démocratie est malade d'opacité, d'affairisme et d'absence de dialogue. Le conseil municipal n'est qu'une chambre d'enregistrement de décisions déjà prises. Les citoyens ne s'expriment que dans la rue.

Comment retrouver confiance en notre démocratie ?

 

En ce qui nous concerne ici, il aurait été souhaitable de rassembler les Castels autour d’une réflexion et d'une action communes

au sujet de la piscine.

 

Nous demandons :

 

– Le retrait du permis délivré et l'arrêt du projet en cours.

– L'organisation d’ateliers afin que les citoyens soient consultés, participent et débattent, aidés par des professionnels.

 

Décidons ensemble de la meilleure reconversion pour le site de la piscine.

 

Les compétences pour penser la ville à long terme ne s'inventent pas. Il est indispensable de s'entourer de professionnels qualifiés :

les urbanistes, architectes, paysagistes sont les seuls formés à imaginer la ville de demain. À défaut, les erreurs des élus se paieront pendant des décennies et le patrimoine démoli sera perdu à jamais.

 

Le maire et le promoteur ont voulu nous appâter en conservant la seule charpente de la piscine. Ils ne veulent décidément rien comprendre à l'architecture.

 

Nous voulons préserver une architecture rare, sur mesure, dialoguant avec un site unique en bord de Marne. Cette œuvre

du génie humain, patrimoine du XXe siècle, ne se réduit pas à une charpente.

 

La destruction de l'ensemble ou la conservation de la seule charpente n'ont aucun sens.

 

L'accueil, la galerie, les bassins, la loge du gardien sont indissociables. Les parties expliquent le tout, ce qu'ont bien compris

les participants à nos visites des Journées européennes du patrimoine et des Journées nationales de l'architecture.

 

Les enseignes de chaîne proposées à la place de la piscine se démoderont vite, comme l'illustrent les disparitions d'Au Bureau

à ChâlonsenChampagne et de Popeyes en France.

Mais, auparavant, elles auront détruit des emplois existants au voisinage. Ce sera un simple transfert de main d'œuvre

d'un commerce à l'autre. À ChâteauThierry, le gâteau n'est pas extensible à l'infini, comme le prouvent les récentes ou imminentes fermetures d'entreprises en cette année 2019.

 

L'enlaidissement des entrées de ville, devenues des zones commerciales allant de pair avec l'étalement des zones pavillonnaires, paradigmes de la « France moche », seratil une fatalité à ChâteauThierry ?

 

Malgré ses dénégations sans scrupules, Sébastien Eugène restera pour l'histoire le fossoyeur du pavillon de l'Arquebuse, bâti

à la Renaissance devant l'hôtelDieu. Il s'apprête à agir de même avec un rare chef d'œuvre d'architecture du XXe siècle à ChâteauThierry, reconnu par les universitaires et architectes en France comme à l'étranger. Le mépris répété du premier édile pour l’architecture est patent. Les philistins ne vandalisent pas qu'en Syrie.

 

Nos propositions au bénéfice de l'intérêt général n'auront pas jusqu'ici rencontré l'écho espéré.

 

À quelles fins inavouables, tramées en coulisses, n'entendon pas la voix des citoyens ?

 

Ensemble, poursuivons notre action.

 

« Assez de vandalisme urbain, assez d'arrogance, mesdames et messieurs les élus, cultivezvous, cessez de nous proposer un monde de plus

en plus rétréci. » Bernard Paurd, architecte.

Association Domisiladoré

 

En bref  

  • La piscine, commandée par le maire Pierre Lemret, constituée de trois bâtiments livrés par les architectes Olivier Vaudou & Reymond Luthi en 1971, a fait l'objet d'un permis de démolir le 29 mars 2019.
  • Le maire impose ce qu'il appelle un « pôle de loisirs » : la piscine devrait être remplacée par deux restaurants de chaîne Au Bureau (surgelé industriel) et Independence Burger (fastfood pas cher avec drive) ainsi que par une crèche Heididom Montessori (butant sur l'avis défavorable de la PMI).
  • Une demande de classement ou d'inscription au titre des Monuments historiques est instruite par la DRAC depuis le 6 mars 2019 ; elle est aujourd'hui bloquée sous l'impulsion du maire mais plusieurs soutiens de la piscine la suivent de près.
  • Les associations SPPEF et Domisiladoré n'ont pas eu d'autre choix que de déposer un recours contre le permis de démolir au tribunal administratif d'Amiens le 31 mai 2019. La procédure suivant son cours, une première audience est prévue début 2020.
  • La SPPEF et Domisiladoré ont tenté de sensibiliser à l'architecture de la piscine, à la préservation de l'entrée de ville et du site en bord de Marne : réunions au cabinet du maire, médias, réseaux sociaux, visites guidées lors des Journées européennes du patrimoine et des Journées nationales de l'architecture (censurées par la municipalité).
  • France 3 Picardie a diffusé le 24 octobre 2019 un reportage sur l'action commune de la SPPEF et Domisiladoré. Interrogé, le maire laisse entendre une inflexion : la conservation de la charpente du bâtiment des bassins répond soidisant à la demande des défenseurs. L'idée de cette mutilation est reprise par le promoteur pour les amadouer après avoir usé sans succès d'autres moyens.
  • Accueillie favorablement par la population, la sensibilisation fut vaine avec le promoteur et les membres de la majorité au conseil municipal. La piscine sera bientôt vendue : l'opportunisme et le courttermisme l'emportent. En conséquence, la SPPEF et Domisiladoré poursuivent leur action.

 

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